Lettre à Justin

Yop,

Je suis désolée si j’ai semblé énervée en partant hier soir et je me dis qu’il faut que je te raconte comment ça se passe dans ma tête dans ces moments-là et comment je le traverse.

Je suis rentrée en vélo en pleine crise de haine de moi.

Dans ces cas-là, je me sens moche, pas désirable, envahissante ; je me déteste. Je revis chaque phrase que j’ai pu dire, chaque geste que j’ai pu avoir et je me dis que je suis vraiment la dernière des connes et qu’il faudrait m’éradiquer.

Il me reste clairement un truc à déconstruire sur ma façon de me valoriser via le regard des autres. Pour ma défense, la lumière que tu as dans les yeux quand tu regardes quelqu’un regonflerait l’ego de n’importe qui et je suis désolée pour toi que tu sois le seul à ne pas pouvoir en bénéficier.

Je suis contente/fière parce qu’hier, j’ai réussi à redescendre toute seule uniquement en raisonnant.

Evidemment, je comprends que tu puisses ne pas avoir envie d’un câlin (oui je pense à ces câlins-là) en même temps que moi. J’ai eu du mal hier parce que je n’avais pas juste envie de baiser comme lundi, j’avais vraiment très envie de toi. C’était pas quelque chose que je pouvais résoudre en ton absence. Je sais jamais non plus si c’est pas la dernière fois.

Zoom arrière : évidemment, je comprends tout à fait que quel que soit le contexte, tu aies le droit de te positionner comme tu le souhaites et ça me semble évident de le respecter ; mais il me manque la case qui implique que tout n’est pas forcément de ma faute.

Je sais aussi que je n’ai pas à te faire porter une névrose qui m’appartient.

Est-ce que je peux te demander malgré tout, les prochaines fois, de ménager mon ego et de m’expliquer que ça ne vient pas de moi, de me dire ce que tu ressens exactement sur le coup / ou bien de me dire que ça vient de moi si c’est le cas ? Je ne parle pas de justification, hein, je parle de me donner les billes pour m’aider à me positionner.

Si je sens que tu dis les choses sincèrement, ça ira.

Ça me fait très bizarre parce que d’ordinaire, sentir précisément ce que les gens ont dans le crâne fait partie de mes talents. Avec toi, pas du tout. C’est assez fascinant mais aussi flippant et ça me fait facilement partir sur ma mauvaise pente.

Dans ces moments de crise, je me dis que je t’aime forcément plus que tu ne m’aimes (en fait non, dans les moments de crise, je pense que je t’aime et que tu me fais l’aumône).

Comme on est dans un mode où on n’entre franchement pas dans les codes sociétaux, j’ai très très peur de te louper, de te blesser, de te vexer. Ça me ferait profondément suer. 

En même temps, je ne peux pas rester comme ça sans savoir sur quel pied danser. Quand je suis avec toi j’ai juste envie de profiter de ta présence et je n’arrive pas trop à parler de ça, alors, je vais essayer d’expliquer ici comment je t’aime et tu pourras me dire ce que tu en penses.

J’adore passer du temps avec toi. Je trouve que tu es un mec fabuleux, que tu es intéressant et que tu es subtil. Je suis fascinée par ton regard sur le monde. Ta bienveillance est une piscine de régénérescence.

Je ne sais toujours pas ce que c’est que l’amour ou une relation amoureuse. Je ne veux pas t’épouser. Je ne veux pas t’imposer quoi que ce soit (à part t’interdire de sauter par la fenêtre). Je veux pas d’autre enfant à moi, mais j’adorerais te voir en avoir un, tu vas nager dans le bonheur quand ça va t’arriver.

J’ai envie de te faire jouir et de te faire jouir encore et plus fort, j’ai envie de découvrir plein de nouveaux trucs sur toi au lit, j’ai envie de te regarder rire et t’énerver, j’ai envie de t’écouter et de te regarder évoluer, j’ai envie que tu m’apprennes à jouer de la basse, j’ai envie de caresser la courbe en bas de tes reins, qu’on aille marcher, boire des bières, faire des concerts, faire des soirées chills, voir des amis, partir en week-end, jouer à des jeux de société. J’ai envie de t’aider à chaque fois que je peux. Je voudrais que la présence des enfants ne soit pas un problème. Je m’inquiète pour ton opération. J’ai envie de voir les trucs chouettes que tu vas faire de ta vie.

J’ai un pincement au cœur quand je pense au moment où cette relation s’arrêtera parce que tu auras trouvé la voie qui te convient. Je me demande comment on appréhendera ou comment j’appréhenderai ce cap.

J’ai souvent des élans de tendresse et je n’arrive absolument pas à comprendre quand je peux t’embrasser et quand je ne peux pas. Je respecte, mais je ne comprends ni quand ni pourquoi.

Comme personnellement j’assume complètement l’attirance et ce que je peux ressentir pour toi, j’ai du mal à doser quel geste je peux me permettre quand. Comment être certaine de ne pas te marcher sur les pieds ? Pourquoi une distance physique parfois et parfois pas ? S’il y a changement de mode, comment on se prévient quand on en change ? Comment on définit une relation comme ça ? J’en sais rien, putain et j’aime tellement pas quand je maîtrise pas.

Bon évidemment, je suis terrifiée en t’envoyant ce message et je suis présentement en train de tourner en rond affolée dans mon propre cerveau.

Bon courage pour la réponse.

</end roman>

(PS : c’est bien Nonce Paolini qui est dans l’émission dont on parlait hier)

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